Biographies-Toute vie peut devenir un roman

.A Yaoundé, j'ai fait la connaissance des jumeaux, Olivier et Patrick Eboué. Ils étaient plus âgés que moi et me faisaient sortir le soir. Très tôt, j'ai participé à la vie nocturne de la ville.

Ce fut une opportunité à double tranchant. Je satisfaisais ma curiosité et, lorsque, sachant je réagissais très vite, on me provoquait pour m'entraîner dans la bagarre, j'étais protégé par ces deux grands frères sportifs. Pourtant, même s'il est bon de connaître le monde, j'ai découvert à quatorze ans, un milieu qui n'était pas adapté à mon âge.

Ma rencontre avec Félix Kameni Tchatchoua a transformé ma vie.

Félix était étudiant et boxeur. Je le voyais le matin revenir du footing tout transpirant. Qu'elle énergie! qu'elle vivacité! qu'elle élégance dans ses gestes à l'entraînement comme dans sa vie!

J'étais en admiration devant ce personnage qui me charmait. Je n'avais plus pour ambition que celle de lui ressembler, de devenir aussi charismatique que lui.

Il préparait le concours pour être professeur à l'INJS et était moniteur de la section boxe. Sa boxe était très belle à mes yeux et j'avais bien envie de suivre son exemple.

Ma mère refusait que je pratique ce sport car un de mes cousins avait succombé à de mauvais coups après un match. Elle a toujours déclaré qu'elle ne me pardonnerait pas si je lui désobéissais.

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La famille s'est réunie avec la grand-mère qui m'a donné un balai suivant la tradition:

"Casse le balai et dis que tu renonces à la boxe."

J'ai cassé le balai mais je suis retourné aux entraînements.

Une semaine après, j'ai été découvert et mes frères se sont jetés sur moi pour me frapper.

Je décidai de devenir encore meilleur boxeur pour qu'ils n'aient plus le courage de poser la main sur moi, même à plusieurs.

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Félix était surnommé Bobo aussi suis-je devenu "Le petit Bobo" et je fus bien accepté. Il savait que j'étais très compétitif et que je l'écoutais énormément. Mon papa étant décédé, il est devenu comme mon grand frère. Nous rentrions ensemble le soir après l'entraînement. L'INJS devint ma deuxième maison.

Puis Félix a créé son entreprise de coaching sportif indépendant et a quitté l'entraînement. Un autre moniteur l'a remplacé qui avait lui aussi un poulain adoptif. 

Je me suis trouvé rejeté et prié de ne pas lui faire de l'ombre. Peut-être Félix était-il parti pour des raisons de concurrence mais il me laissait seul, sans mentor et j'ai du attendre longtemps avant d'être reconnu officiellement. Même si j'étais meilleur, c'est l'autre qui était choisi pour les matchs internationaux et je n'étais introduit nulle part. On me volait mes victoires.

Finalement j'ai cessé d'attendre Félix et je suis allé m'entraîner trois fois par jour au lieu de deux.

Pour gagner de l'argent, je suis devenu videur d'une boite de nuit.

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J'avais dix-huit ans et j'étais tellement content de participer à un championnat du monde! J'étais devenu un athlète de haut niveau, reconnu. Je me voyais défilant derrière le drapeau du Cameroun pendant la cérémonie d'ouverture!

Eh bien, non! pas de cérémonie! Les athlètes de tous les pays étaient sur place depuis plusieurs jours pour se mettre en condition et nous, nous avons débarqué dans la nuit le jour du premier combat après des nuits d'escales épuisantes dans les aéroports.

Ma colère contre mon encadrement avait débuté au Kazakstan lorsque nous nous sommes retrouvés enfermés à clé le soir dans notre chambre comme des gamins. Les autres acceptaient assez bien. Pas moi, j'enrageais. Nous n'avions pas le droit de parler avec les autres mais moi, je m'y étais fait de bons copains. Je ne supportais pas ce manque de liberté.

A chaque fois qu'il y avait un tournoi international organisé je trouvais la place vide en arrivant au lieu du rendez-vous. L'équipe était déjà partie.

Mais quelle organisation! Comment espérer gagner quoi que ce soit dans ces conditions?

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Au retour, nous sommes deux par chambre à l'hôtel de l'aéroport de Roissy. Chacun a pour charge de surveiller l'autre. Il est cinq heures du matin.

 X prend sa douche. J'ouvre discrètement la porte et me glisse dans le couloir.

Issa ouvre la sienne au même moment:

- Tu pars?

- Oui, viens avec moi!

- Attends, je prends mes affaires.

- Pas besoin. On est en France. Il y a tout ce qu'il faut dans ce pays.

Nous courons prendre le bus qui nous amène à la station RER. Là nous rencontrons un nigérien qui nous procure un ticket pour la gare du Nord. Un autre nous achète une carte téléphonique et un ticket de métro car nous n'avons pas un euro en poche. Nous arrivons dans le 17eme arrondissement. La communauté camerounaise y est très présente.

Calvin, un ancien boxeur, parti en 1999 après les championnats d'Afrique et resté en France, invite Issa à dormir chez lui car tous les deux se connaissent. Il n'y a pas de place pour moi, aussi il m'accompagne dans un foyer. Je préfère encore dormir dans une cabine téléphonique plutôt qu'avec les clochards. ..........

Un Camerounais responsable de son restaurant me propose de l'aider à faire des travaux. Plus tard, je rencontre quelqu'un qui tient un cybercafé et qui m'embauche pour faire sa comptabilité.

Il m'offre de m'installer dans une chambre dans son sous-sol. Je m'aménage un lit avec un matelas trouvé avec les encombrants sur le trottoir. Je travaille pour lui de 9h du matin à minuit. Je n'ai pas de papiers puisque la fédération les a confisqués mais je suis en France et je suis libre.

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Je me suis entraîné le plus possible et le président du club s'est intéressé à moi. Il a envoyé un courrier à l'ambassade pour récupérer mon passeport et a décidé de s'occuper de ma carte de séjour. En même temps il a fait pour moi une demande de carte professionnelle à la Fédération française. Je l'ai obtenue et j'ai été classé en série B.

J'ai commencé à rencontrer des gars très expérimentés et j'ai gagné la coupe de France professionnels en 2004.

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